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Heure d'hiver
October 26, 2025 at 7:00 AM
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On confond encore trop souvent introversion et timidité. Or, l’introverti n’est pas celui qui craint le regard des autres, mais celui qui récupère son énergie ailleurs que dans le bruit du monde. Là où l’extraverti se recharge dans le mouvement et l’échange, l’introverti se ressource dans le retrait temporaire et la réflexion intérieure. Il peut être sociable, charismatique, bon orateur. Simplement, il ne peut pas — ou ne veut pas — l’être en continu.

Pendant longtemps, le leadership s’est raconté en mode extraverti : visible, volubile, fédérateur à voix haute. Celui qui parlait le plus était souvent considéré comme le plus convaincu, donc le plus convaincant. Ce modèle a façonné des générations de dirigeants persuadés qu’il fallait occuper l’espace, produire de la présence en continu, montrer qu’ils étaient là.

Mais il existe un autre style de leadership, plus discret, plus dense, moins spectaculaire. Celui qui écoute avant de trancher. Qui met du temps à parler, mais crée du poids lorsqu’il le fait. Qui ne cherche pas à enrôler par l’énergie, mais par la cohérence. Ce leadership-là n’est pas moins fort. Il emprunte simplement un autre chemin : celui de la constance tranquille.

L’heure d’hiver est presque une métaphore de ce style. Elle ne pousse pas au retrait par faiblesse, mais à un ralentissement qui permet la décantation. Ce temps-là ne produit pas moins d’idées, mais des idées plus structurées. Les introvertis y trouvent souvent une respiration naturelle, un terrain où leur rythme cesse d’être décalé par rapport à l’environnement.

On dit parfois qu’ils manquent de visibilité. La question est peut-être mal posée. Ce n’est pas toujours le volume de la parole qui compte, mais sa justesse. Parler moins, mais dire quelque chose qui reste, peut avoir davantage d’impact que multiplier les interventions sans densité. L’introversion n’est pas un retrait du leadership ; c’est une autre manière de l’incarner.

Ce passage à l’heure d’hiver peut alors devenir un moment utile pour se poser une question simple : ma manière d’exercer le leadership est-elle alignée avec ma source réelle d’énergie ? Certains extravertis s’apercevront qu’ils saturent et que le bruit devient fatigant. Certains introvertis réaliseront qu’ils ont passé trop de temps à tenter de correspondre à un modèle qui n’est pas le leur.

Je ne fais pas une apologie du silence, ni une critique de l’expression. Je réfléchis au rapport entre présence et justesse. Ill existe des leaders qui n’occupent pas forcément l’espace, mais qui le structurent. Le monde a besoin de voix fortes… mais aussi de voix calmes qui savent exactement pourquoi et de quoi elles parlent.

Gagner une heure, ce n’est pas seulement avoir du temps en plus. C’est peut-être une chance de revenir à un rythme intérieur plus juste, et d’en faire la base d’une influence plus solide.